Actualité publique

30 septembre 2018

Résultat de la 36ème session de l'atelier francilien « La vie dans les métropoles au XXIème siècle ».

La 36ème session des ateliers internationaux de maitrise d’œuvre urbaine vient de se terminer par la réunion du jury international, à Cergy-Pontoise. Face aux menaces écologiques et sociales des métropoles de demain, la nouvelle génération de professionnels a bousculé les conventions et ouvert des voies nouvelles, au point que certains membres du jury ont ressenti « un sacré coup de vieux ». Leur message est clair : les méthodes traditionnelles ne sont plus à la hauteur des défis, changeons radicalement notre manière de voir et nos comportements. Ces moins de 30 ans l’ont fait avec une grande foi dans l’avenir, loin des visions pessimistes de trop de prospectivistes. Ils ont su allier la joie de vivre et la confiance dans l’humanité à une conscience aigüe des montagnes qu’ils devront déplacer tous ensemble, avec nous, ont-ils dit.

Le dernier atelier international de maîtrise d'oeuvre urbaine francilien s’est déroulé du 3 au 28 septembre 2018 et s'intitule « Quelle vie dans les métropoles au XXIème siècle ? ». Il s’intéresse à l'évolution des modes de vie des métropolitains, et à la façon dont la ville et les territoires peuvent répondre à ces bouleversements. Entre l'urgence du changement climatique, la fulgurante révolution technologique et le gigantisme métropolitain qui se développe sur tous les continents, où et comment vivrons-nous demain, dans un monde à la fois de plus en plus urbanisé, écologique et connecté?

La production de l’atelier francilien 2018 :

Après deux ans de préparation, l’atelier a accueilli 20 jeunes professionnels, de 13 nationalités différentes, pour un mois de travail en équipes. Ils ont pour le moins bousculé le jury, ce 28 septembre et à travers lui, élus, professionnels et citoyens. Leur message en substance : “Nous ne pouvons plus faire confiance à vous, qui êtes aux commandes, à vos modes de fixation des objectifs et à vos modes de travail. Leur dominante technocratique à forte dose d'ingénierie, mise en oeuvre dans un schéma top-down, sont menées dans l'inconscience de l'extrême urgence des impératifs climatiques. Elles laissent de côté les deux entités qui doivent être le coeur même de la démarche : l’humain avec son aspiration au bien-être et la nature, qui est le cadre dans lequel cet humain doit s’inscrire. Prendre au sérieux ces enjeux, bouleverse nos modes de vie. C’est de la vie commune, à l'échelle locale et d’initiatives de terrain menées en réseaux, que peuvent émerger progressivement cette transformation. C’est aussi un chemin pour construire ensemble un sentiment d’appartenance à des territoires à plus grand échelle, jusqu’à l’échelle métropolitaine.”

Les propositions sont en conséquence :

  • Il s’agit en priorité de favoriser la connectivité directe au plus proche, l’échange de savoirfaire, de services, la plus grande autosuffisance alimentaire possible, saine ; ce qui demande une démarche éducative pour l’accompagner.
  • Il s’agit également, en matière de travail comme pour les autres activités communes, de les ancrer sur le territoire en s’appuyant sur ses ressources. D’où le développement de lieux où cette vie commune puisse s’épanouir. Ceci permettra de redonner de la valeur à des emplacements comme les grandes surfaces commerciales ou les parkings, devenus, obsolètes. Trois changements concourent à cette obsolescence et à un renouveau potentiel sur ces lieux : l'évolution de la technologie, -l’e-commerce par exemple-, celle de l'économie, - systèmes de production sans cesse évolutifs sur une échelle mondiale-, et enfin celle des mobilités.
  • Quant à l’agriculture, les participants préconisent l'évolution de la destination des exploitations, -moins d’extensif et d’export, plus de local-, mais aussi une plus grande souplesse de l’usage des sols, mêlant rural et urbain. Ce qui les amènent à une évolution drastique du statut de la propriété, dissociant l’usage des sols de la propriété du foncier.
  • Ils constatent clairement que la robotisation et la numérisation galopantes de nos économies permettront l’atteinte d’objectifs analogues, voire supérieurs, mais avec moins de travail humain, laissant à chacun davantage de temps à consacrer à autre chose que le travail productif de biens et de services, au sens actuel du terme. Le chiffre de 6h par jour vouées au travail a été articulé. Ils distinguent le travail forcément présentiel, comme celui de l’infirmière, du gardien ou de l’éboueur, du travail qui peut être effectué en partie à distance. Et pour tout ce qui n’est pas présentiel, ils proposent que des politiques vigoureuses d’incitation favorisentle télétravail chez soi ou en tiers-lieu, réduisant de manière drastique les migrations alternantes, les embouteillages et les transports publics saturés.
  • Quant aux conséquences de la numérisation en cours, sur la vie collective, révolution des mobilités notamment, elles sont ici considérées comme des évidences, déjà intégrées dans le quotidien de ces jeunes, malgré la diversité de leurs provenances. « Ce n’est pas l’individu qui va au travail, c’est le travail qui suit l’individu. »
    Au regard de ces démarches totales et conçues dans un enthousiasme unanime de ces jeunes de « la dernière génération à même d’écarter la menace climatique, et qui seront aux commandes demain, on ne peut que se remettre en question de fond en comble. »

Le jury

Au delà du constat de cette convergence entre les propositions des 4 équipes, le jury a émis trois types de remarques et a entendu quelques réponses :

  • Certaines de ces visions existent déjà, elles sont mises en oeuvre ici ou là, tant en entreprise que dans la vie locale, ce qui signifie que la “graine” d'expérience n’est pas toujours à inventer. Alors pourquoi n’allons nous pas aujourd’hui, plus vite et plus loin?
  • Le terrain dégagé par l’action locale pourrait préparer un lit douillet aux Gafam…, à moins que la prise de conscience de ce qui doit rester, le libre arbitre, ne reprenne le dessus. Au delà des nécessaires règlements européens, et de l’indispensable débat permanent sur les réseaux comme dans les médias, il revient à chacun de prendre conscience et de tirer les conséquences de cet enjeu ultime.
  • Considérer le local comme seul moteur de transformation de la société, hors toute intervention de l’action publique serait dangereux, en ce qu’il peut être favorable au progrès des populismes. C’est d’un membre du jury provenant de l’autre côté de l’atlantique que provient cette remarque. Il n’est pas le seul à l’avoir faite. Sur le même thème est avancé le constat de la diversité des moyens des populations à imaginer le monde, -culturels, intellectuels et matériels-, mais aussi une question : le modèle proposé est-il additif ou substitutif ? A l’inverse du tout local, si le mécontentement et la défiance de nos contemporains vis à vis de l’action collective ne sont pas entendus, le risque est tout aussi patent. Les actions modestes proposées sont précisément à portée de chacun, tandis que les modèles ne sont ni additifs ni substitutifs mais de transition. L’articulation des initiatives locales et de la gouvernance globale des territoires apparait bien incontournable.
    D’ailleurs, à la dernière question du jury : “Comment allez vous faire ?” La réponse du dernier interpellé claque : « Nous avons besoin de vous tous pour répondre à cette question. »

Pour en savoir plus sur l’atelier « La Vie dans les métropoles au 21ème siècle » et les partenaires qui l’ont soutenu et accompagné tout au long :

https://www.ateliers.org/fr/workshops/213/
https://www.ateliers.org/media/workshop/documents/affiche_v9.pdf
https://ateliers.org/media/documents/newsletter_36eme_atelier_francilien.pdf